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Mémorial des Rois,
section  perse                          
La couronne impériale de Sa Majesté la Shahbanou
Point de Vue n° 3358
Semaine du 28 novembre au 4 décembre 2012

Van Cleef & Arpels et les reines
Un destin serti et mystérieux

Dans son nouveau livre, Vincent Meylan raconte la légende d'un des plus célèbres joailliers de la place Vendôme.
Des bijoux de la maharani de Baroda aux trésors de la couronne d'Iran, notre confrère, chef des services Histoire et Royauté à « Point de Vue», raconte avec passion la saga de ces fabuleuses parures créées pour des reines et des  croqueuses de diamants.

Entretien.
Propos recueillis par Raphaël MORATA
Point de Vue : La joaillerie est-elle toujours un monde dont les secrets sont difficiles à percer ?

Vincent Meylan : C'est très touchy... Je me suis efforcé d'aller le plus loin possible en respectant des limites très claires à la fois dans le temps et dans le style des découvertes rassemblées dans ce livre. Je ne parle jamais d'argent, par exemple.


Y a-t-il encore des documents non « déclassifiés » chez Van Cleef & Arpels ?

Il y a toujours des documents confidentiels dans un milieu aussi intime que la joaillerie. Je suis persuadé que j'ignore toujours beaucoup de choses. C'était aussi le cas chez Boucheron pour mon précédent livre. Des commandes passées après les années 1960, on ne peut toujours rien dire, à moins que les bijoux ne soient publics. S'il y a des exceptions dans cet ouvrage, c'est que j'ai obtenu l'accord de certaines personnalités et ayants droit.


Lesquels vous ont permis de révéler des informations ?

Le prince Albert II de Monaco, par exemple, ou encore l'impératrice Farah d'Iran. Grâce à l'aide de la Shahbanou, qui m'a confié un dossier de dessins, j'ai pu explorer les deux commandes faites par la cour d'Iran chez Van Cleef & Arpels : celle du couronnement, en 1967 et une autre moins connue, dans les années 1970. Nous avons d'ailleurs inséré dans ce livre un encart avec dépliant sur les joyaux de la couronne d'Iran.
Quelles sont les plus belles découvertes que vous avez faites dans ces archives?

La famille Arpels assurait une activité de conseil auprès de ses plus importantes clientes. Elle leur établissait des inventaires avec des photographies très précises. J'ai pu consulter le catalogue de Barbara Hutton, celui de la comtesse Revilla de Camargo, « la Pompadour de Cuba », et surtout celui de la maharani de Baroda. Là, je suis tombé à la renverse !Tout y est consigné : les bijoux tels qu'elle les a reçus en Inde, puis la façon dont ils ont été transformés par Van Cleef & Arpels. On trouve des colliers à deux, trois, quatre ou six rangs de perles, parfois aussi grosses qu'une olive ou qu'une noix, assemblées avec des rubis, saphirs, émeraudes, ou diamants... L'ensemble, en 1946-1947, était estimé à deux millions de livres sterling. Soit plus de deux cents millions d'euros d'aujourd'hui, un chiffre hallucinant ! Il y a des semaines où la maharani allait quatorze fois chez Van Cleef & Arpels... A côté, Elizabeth Taylor fait parente pauvre.


Les dessins des commandes vous ont-ils aidé à jouer au détective ?

Un dessin peut confirmer une information, une date. Il peut aussi révéler un fait nouveau. J’ai découvert que les trois insignes de dames d'honneur de la princesse Grace provenaient de Van Cleef & Arpels. Ils ont été commandés par le prince Rainier. J'ai aussi reconstitué le parcours de certaines parures de la duchesse de Windsor, transformées après la Seconde Guerre mondiale. Ainsi ce bracelet de rubis et d'émeraudes sur un bandeau de laque noir, fut modifié en collier chez un autre joaillier dans les années 1960.
Reste-t-il encore des mystères, des pièces mythiques manquantes ?

Personne ne sait ce qu'il est advenu de la commande de la princesse Fawzia d’Egypte, en 1939, ni de la célèbre croix des Andes de l'Impératrice Eugénie, taillée dans une seule émeraude... Mais j'ai retrouvé la trace du diadème d'émeraudes et de diamants de Marie-Amélie, la dernière reine des Français, passé chez Van Cleef & Arpels dans les années 1950: une photographie, reproduite pour la première fois dans mon livre, en atteste. Nul ne sait où il se trouve actuellement, mais j'ai ma petite idée...


Vous mettez en lumière les « dames Van Cleef & Arpels». Pourquoi ?

On parle toujours du sens inouï des pierres précieuses de Jacques Arpels, du génie du dessin de Pierre Arpels ou du talent d'entrepreneur d'Alfred Van Cleef. Mais derrière ces hommes, il y avait des femmes remarquables. Si je devais en retenir une, ce serait la trop discrète Esther Arpels. Elle m'a bouleversé. Grâce aux documents et aux photos que m'ont confiées des descendants de la famille, j'ai pu brosser le destin de ce personnage, depuis la Grande Guerre, où elle a travaillé dans un hôpital pour grands brûlés, à son parcours de résistante sous l'occupation allemande, alors qu'elle était elle-même juive et persécutée.


Y a-t-il une cliente « type » Van Cleef & Arpels ?

Les modes et les styles changent, mais ce sont toutes des amoureuses, des passionnées des pierres précieuses, sensibles à une qualité de savoir-faire inégalée. C'est aussi le travail de tous ces artisans que l'on nomme chez Van Cleef & Arpels les « mains d'or» qui donne son éclat aux joyaux. Cela se confirme encore aujourd'hui avec la dernière Biennale des antiquaires, où le joaillier a présenté, entre autres, les deux plus beaux rubis de Tanzanie du monde et deux diamants poires exceptionnels.
Parmi toutes les amatrices de pierres dont vous brossez le portrait, l'une vous a-t-elle touché en particulier ?

J'ai été très ému par les petits bibelots et les souvenirs de Nina Dyer, qui s'est suicidée : ses clefs de voiture plaquées or avec des pierres précieuses, ses fume-cigarettes, sa médaille gravée d'un petit message très personnel de son ex-mari, le baron Thyssen.


Dans votre introduction, vous parlez de « gold gotha ». Qu'est-ce ?

J'ai emprunté ce titre à un livre de José Luis de Vilallonga. Un bijou, c'est souvent un roman, d'amour ou de sang, entre naissance et résurrection.


L'ADN d'un bijou ne se réduit pas à son nombre de carats...

Un joyau, c'est une histoire. Une transmission. Un cadeau. Une rupture. Une vente. Une psychologie. Quand le sentiment arrive dans le trésor, il entre dans la légende ! J'aime imaginer Aristote Onassis réglant ses intrigues amoureuses, de Maria Callas à Jackie Kennedy, dans le huis clos des bureaux Van Cleef & Arpels. Ou encore le prince de Galles achetant en cachette à Paris, en 1934 et 1935, des bijoux pour Wallis Simpson qui n'était pas encore divorcée... En étudiant les commandes passées je comprends mieux, aujourd'hui, les liens entre membres de familles royales. Les cadeaux somptueux faits à la princesse Lilian de Réthy par son mari, le roi Léopold, puis par son beau-fils, le roi Baudouin, sont, en ce sens, de véritables témoignages.


Certaines familles royales commandent-elles toujours des bijoux chez Van Cleef & Arpels ?

Sans commentaire !
Vous n'évoquez pas le diadème créé par Van Cleef & Arpels et offert en cadeau de mariage à la princesse Charlène par le prince de Monaco ?

Il est très beau et montre à lui seul combien la haute joaillerie reste un symbole actuel, mais il fallait faire des choix. J'ai préféré évoquer les bijoux de la princesse Grace.


A côté de la grande histoire, il y a des anecdotes plus légères, voire carrément amusantes, comme celle de Fantomas.

Chez qui Fantomas, le plus grand voleur au monde, monte-t-il un casse ? Chez Van Cleef & Arpels, bien sûr ! Pierre Arpels tient son propre rôle dans le film d'André Hunebelle de 1964. Un coup de pub génial, donnant la mesure de la légende Van Cleef & Arpels.



«Trésors et légendes. Van Cleef & Arpels »,
par Vincent Meylan,
éditions Télémaque
480 pages, 27€
Vincent Meylan, auteur notamment de l'ouvrage:
"La véritable Farah" paru en l'an 2000 aux éditions Pygmalion
(342 pages)